Les psychanalystes, Freud et Jung en tête, connaissent bien l’existence de l’inconscient familial. L’étude en psychogénéalogie est une recherche spécifique destinée à retrouver les traces de cet inconscient familial. Qu’a-t-il répété, de façon masquée ou très claire ? De quelle façon a-t-il marqué les générations, jusqu’à nous ? Pourquoi, quel sens donnons nous à ces correspondances et répétitions ?

 
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Le poids du secret. Quand un événement important, concernant la vie, la mort, la naissance, l’honneur, la trahison, la déchéance, la maladie, un traumatisme de guerre, de  migration… s’est produit à une génération, une chape de silence s’abat sur le fait traumatisant la plupart du temps. Les personnes l’ayant vécu cherchent l’oubli, ne savent pas dire… Parfois quelques bribes sont soulevées, parfois c’est le silence total. Mais le fait vécu, même ignoré par la génération suivante, car personne n’en parle plus, demeure dans l’inconscient familial. Par transmission de cet inconscient au cours des générations, nous recevons en héritage parfois de lourds tributs, des secrets assourdissants, porteurs de forte culpabilité inconsciente. Toutes les familles regorgent de ces non-dits, de ces refoulements. Or, le refoulement cherche à s’exprimer, a besoin de s’extérioriser : « ça parle ! »

Pour repérer ce qui nous relie à ces événements douloureux ou difficiles à digérer par la tribu familiale, il faut aller retrouver les correspondances entre les faits, les dates, les prénoms, de façon à les lire pour déceler ce qu’elles transmettent. Le but est de comprendre quelle est la loyauté invisible, qui nous relie à cette histoire, et de s’en libérer. Quelle dette invisible payons nous, transmise par les générations au-dessus ?

Explications. Dans Aïe, mes aïeux ! Anne Ancelin-Schützenberger décrypte les lois auxquelles obéit cette transmission générationnelle. Ces lois s’articulent en forme de  « comptes  à régler ». En tant que maillon de la chaîne transgénérationnelle, chacun possède son propre compte fait de recettes et de dépenses, et de dettes à honorer.

Chaque famille possède son propre système de loyauté, basé sur les valeurs importantes à ses yeux et sa comptabilité en termes de mérites et de dévalorisations. Chaque sujet d’une famille est assujetti à cette échelle de valeurs sur laquelle il occupe une place, plus ou moins en hauteur, tout en bas ou tout en haut, ou carrément en dehors, rejeté.

En effet, une famille se structure en répartissant les rôles de chacun. Ces rôles correspondent au système de valeurs de la famille. Si un sujet d’une famille se comporte en conformité avec le système de valeurs en vigueur, il aura une place haute en mérites reconnus. Si un autre au contraire ne vit pas selon les codes valorisés, commet une faute, déroge aux règles morales admises, il sera déconsidéré, voire banni, la structure familiale considérant qu’il a trahi le système de valeurs. Et cette « trahison », porteuse d’une culpabilité inconsciente, se transporte aux générations suivantes.

Chacun a la volonté d’être un maillon loyal de la chaîne familiale. La loyauté est ce qui relie chacun à son groupe d’appartenance. Or, cet attachement peut être vécu comme trop lourd, et parfois empêcher un sujet de vivre sa vie selon sa liberté d’être.

Exemple :  des parents aux moyens limités se sacrifient pour payer des études à leur enfant, dont la réussite est à leurs yeux le but suprême, comme une revanche sur leurs sentiments d’échecs ou de dévalorisation sociale. Le système de valeurs familial est constitué des valeurs travail, réussite sociale, sacrifice, dur labeur, sans plaisir, sans loisir. Le fils, par loyauté, se doit d’être le meilleur, de faire des études les plus ardues, sacrifiant sa vie à son tour. Et s’il n’est pas heureux de cette situation, alors qu’il correspond point par point aux idéaux familiaux, et s’y est conformé entièrement, s’il ressent le besoin d’autre chose, s’il se sent contraint et a besoin de se libérer, il vivra une forte culpabilité qui posera des freins à son désir d’épanouissement personnel, d’émancipation du giron familial.

Ce qui nous lie à l’histoire familiale est la plupart du temps non conscientisé. Les valeurs transmises le sont par les actions, les habitudes, les paroles de louange ou de dénigrement. C’est ainsi tout un ensemble de valeurs que nous recevons au cours de notre enfance, sans en avoir conscience…

Par exemple, pour beaucoup de famille, la valeur travail est la plus méritoire. Pour d’autres, les valeurs de créativité sont essentielles. Pour d’autres, la préservation du patrimoine est la valeur à transmettre.

Il n’y a aucun jugement à avoir sur ces valeurs, c’est juste un constat. C’est aussi grâce à ce système qu’une famille se structure, se rassemble, existe comme un groupe fort.

Les liens transgénérationnels, puissants, peuvent expliquer certains de nos échecs, de nos difficultés.

Dans le volet n°3 de notre chronique sur la psychogénéalogie, nous aborderons de plus près ce qu’est une recherche personnelle en psychogénéalogie.