Petites scènes capitales - Sylvie Germain

C’est l’histoire de Lili Barbara. Elle porte deux prénoms, l’un interdit d’usage mais présent sur son état civil, l’autre utilisé, mais non officiel. Lili Barbara est une petite fille seule avec son père. Sa mère partie, jamais revenue, est maintenant morte dit le père. Alors on suit Lili Barbara dans sa nouvelle famille, lorsque son père se remarie avec une femme ayant trois filles et un garçon. Difficile adaptation dans cet univers recomposé où les quatre filles dorment dans la même pièce. Rapidement, un autre événement dramatique arrive, puis un autre. Le destin s’acharne sur Lili Barbara. La vie est tragique, la petite fille est mélancolique, solitaire. Puis son histoire de vie se perd un peu dans une jeunesse sans but, s’égraine au fil de l’histoire collective, au sein d’une communauté des années d’après 68, donnant un semblant de sens à son existence. Puis elle devient artiste-peintre. Sa quête du regard et de la reconnaissance du père sera vaine.

Sur la forme, le roman est une suite de courts épisodes, 49 scènes, des instantanés, des fragments de vie qui s’additionnent pour former le parcours de vie de Lili Barbara.

« Le goût du sucre à demi fondu, gorgé de chaleur, d’amertume et de vagues parfums de feuilles et d’écorce –juste cela, cette saveur dans la bouche, la fine brûlure dans la gorge, la sensation toute simple, très nue, très forte, d’être en vie. En vie. »

« Elle n’a pas vu passer le temps, en elle demeure l’enfant qu’elle fut, intacte dans ses questions, ses joies, ses effrois et ses rêves, l’adolescente meurtrie par un deuil consumé de jalousie et d’espoir, la jeune femme en errance et celle en grand enjouement amoureux, la marginale au scepticisme irréductible et l’artiste éprise d’empreintes et de couleurs. »

Petites scènes capitales
Sylvie Germain
Éditions Le Livre de Poche
Paru le 26 août 2015
240 pages
6,90€

 
Sylvie Germain : femme de lettres française. Elle a suivi des des études de philosophie et travaillé pour le Ministère de la Culture. Auteure de contes, nouvelles, romans, elle a reçu de nombreux prix littéraires pour ses romans. Elle a enseigné la philosophie et le français dans un lycée français à Prague. Elle a été candidate pour entrer à l’Académie française. Elle a été élue à l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique en 2013.

 
De belles phrases sur les instants d’émerveillement, de connexion avec un arbre, une fleur, un chant d’oiseau, une sensation. De beaux passages pour décrire l’appel à quelque chose d’autre, un au-delà en transcendance, que chacun traduit à sa manière. Ces moments de grâce permettent aux personnages de renaître de leurs douleurs et de s’émanciper de leur vie terrienne très tourmentée.

D’habitude j’aime beaucoup les livres de Sylvie Germain. Mais là, je l’ai trouvée un peu trop morbide. Son livre est émaillé de morts, toutes tragiques au bout de vies dérisoires et qui sont résumées, comme si elles passaient en un clin d’œil. Cela donne une impression de tristesse, de fatalité. Quand une perspective réjouissante émerge, elle est aussitôt fauchée par une mort qui met un terme à tout espoir, constituant une série d’élans brisés. . Les destins sont aussitôt lourdement chargés. Chacun a un paquet de fagot sur le dos et peine à le traîner jusqu’au bout. Rien de très constructif, aucun personnage n’est sorti de ses limbes, dirait-on. L’impression générale est bizarre, du coup. Comme si l’auteur avait écrit ce livre dans une période de déprime profonde ! Les instants de grâce et de sensations liées à la nature sont les seules ouvertures dans ce monde.